Technical Report NTB 13-02

An Assessment of the Impact of the Long Term Evolution of Engineered Structures on the Safety-Relevant Functions of the Bentonite Buffer in a HLW Repository

Dans le concept de stockage géologique de la Nagra pour les éléments combustibles usés et les déchets de haute activité vitrifiés, la bentonite – en tant que composante des barrières ouvragées et matériau de remblayage des galeries – joue un rôle important pour la sûreté du dépôt, ceci notamment en raison de sa faible conductivité hydraulique et de ses propriétés de gonflement. Ces caractéristiques doivent perdurer tout au long de la période considérée dans les analyses de sûreté. Bien qu’il soit possible d’utiliser les analogues naturels pour démontrer la stabilité de la bentonite dans l’environnement d’un dépôt en couches géologiques profondes, certains processus sont toutefois susceptibles d’affecter ses performances sur le long terme, comme par exemple les gradients de température en rapport avec la chaleur dégagée par les colis de déchets, mais aussi les interactions chimiques avec des matériaux instables du point de vue thermodynamique (le ciment et l’acier).

Le présent rapport est consacré aux interactions potentielles, dans un dépôt géologique pour éléments combustibles usés et déchets de haute activité situé dans les argiles à Opalinus, de différents composants des barrières ouvragées avec la bentonite: conteneur en acier, éléments de soutènement (revêtement en béton, treillis d’armature et cintres en acier, etc.), mais aussi élé­ments en relation avec l’exploitation du dépôt (rails). Ces interactions non-linéaires entrainent des réactions telles que transport de fluides, échanges d’ions, dissolution et trans­formations minérales, qui sont fortement liées les unes aux autres et induisent des modifications des propriétés physiques de la bentonite, telles que la pression de gonflement, la perméabilité et la porosité. Même si, du point de vue chimique, la bentonite n’interagit pas de la même manière avec l’acier et les matériaux cimentaires, les modifications s’effectueront selon une échelle de temps comparable du fait que les principaux processus (dissolution de la montmorillonite dans un environnement alcalin, formation de zéolithes et de phyllosilicates) se déroulent à la même vitesse. Bien que l’on étudie ces modifications sur une période de un million d’années, il est possible que l’évolution du champ proche se fasse plus rapidement, en raison de contraintes de transfert de masse (valeurs de porosité s’abaissant jusqu’au niveau zéro) ou de bilans massiques (réactifs épuisés). Du fait de la durée de certains de ces processus, ils ne peuvent pas tous être étudiés par le biais d’expériences de laboratoire conventionnelles. Ceci signifie que les résultats de simulations transport/réaction publiées ont joué un rôle important dans l’évaluation des principales caractéristiques sur les périodes prises en compte dans l’analyse de sûreté.

Cette étude suggère que, si l’on estime de manière optimiste l’altération de la bentonite sur 100 000 ans, limitée par des contraintes de transfert de masse (valeurs de porosité s’abaissant jusqu’au niveau zéro), il se formera une fine couche d’altération (0.05 m d’épaisseur, 1 % du volume total de bentonite) autour du conteneur, produite en partie par la redistribution thermique des minéraux et des solutés aqueux, et par l’interaction du conteneur en acier avec la bentonite. Cette fine zone sera caractérisée par une porosité et une pression de gonflement nulles (la montmorillonite sera complètement altérée), mais sa conductivité hydraulique sera restée la même (on suppose que des fissures éventuelles compenseront l’impact de la baisse de porosité). Du point de vue minéralogique, on considère que cette zone consistera en une fine couche de calcite, de gypse / anhydrite et de magnétite autour du conteneur, la montmorillonite de la bentonite altérée étant remplacée par des silicates de fer tels que la cronstedtite, la berthièrine et la chlorite. Cette zone altérée interne sera entourée par un anneau de 0.68 m (92 % du volume total) de bentonite intacte.

L’interaction potentielle des structures métalliques autres que le conteneur avec la bentonite est relativement faible. Même si, pour la transformation de la montmorillonite en chlorite, on utilise une contrainte de bilan massique sans limites cinétiques ou de transfert de masse, seulement 2 % du volume total de bentonite autour du conteneur seraient transformés à l’issue d’une réaction avec ces structures. Si l’on retire les rails avant la fermeture du dépôt, ce chiffre s’abaisse à 1 %  du volume total.

A la limite extérieure de la bentonite, l’altération du remblayage et du scellement proche du revêtement en béton est, de manière optimiste, estimé à 0.02 m d’épaisseur (4 % du volume total) 100 000 ans après la fermeture du dépôt (il faut remarquer que cette évaluation n’est pas réaliste du fait qu’il n’y pas de béton à l’interface du scellement). On estime que la conductivité hydraulique de cette zone aura diminué par rapport à l’état initial. La porosité et la pression de gonflement de cette zone vont probablement tomber à zéro sur une période allant de quelques centaines à un millier d’années en raison de l’altération de la montmorillonite. La composition minéralogique de cette zone sera probablement caractérisée par une séquence de calcite, des minéraux C-(A)-S-H, des zéolithes de calcium, des argiles de type sépiolite et saponite, les minéraux C-S-H étant localisés dans la zone la plus proche de l’interface avec le ciment, et tandis que d’autres minéraux tels que les zéolithes et les argiles apparaitront dans la zone proche du conteneur.

Le revêtement en béton lui-même peut se dégrader (transformation de la portlandite et de gel C‑S-H en ettringite), entrainant une augmentation significative de la porosité. Les simulations de réaction / transport indiquent que sur 100 000 ans, la porosité pourra augmenter de quelques pourcents, en se basant sur une évaluation optimiste de la dégradation.

Il n’y a pas de conteneurs à proximité du scellement. En revanche, on trouve des cintres et un treillis d’armature, des tirants d’ancrage et des rails – tous ces éléments étant en acier. Sur la base des contraintes de bilan massique décrites plus haut pour la transformation de mont­morillonite en chlorite, on estime qu’un maximum de 5 % du volume de bentonite pourrait être transformé en silicates non gonflants. Si l’on retire les rails avant la fermeture, ce chiffre s’abaisse à 4 % du volume total.  

Pour obtenir une évaluation pessimiste de l’altération de la bentonite 100 000 ans après la fermeture du dépôt, on pose comme hypothèse que le processus de corrosion a conduit à la dégradation complète du conteneur en oxyhydroxydes de fer et que, dans la bentonite qui l’entoure, la  montmorillonite s’est complètement transformée en silicates de fer non gonflants, tels que  la cronstedtite, la berthièrine et la chlorite (évaluation du bilan massique). On considère que suite à cette transformation, ni la porosité, ni la conductivité hydraulique de la bentonite ne seront affectées; en revanche, la pression de gonflement tombera à zéro. On estime que cette zone altérée aura une épaisseur de 0.45 m et s’étendra jusqu’à la zone de bentonite altérée par l’interaction avec le revêtement en béton.

De même, toujours selon une estimation pessimiste, on considère que le remblayage et le scellement en contact avec le revêtement en béton auront encore une épaisseur de 0.2 m (35 % du volume total de bentonite) 100 000 ans après la fermeture du dépôt. On estime que, dans cette zone, la porosité et la conductivité hydraulique originales ne seront pas modifiées, mais qu’en raison de la transformation de la montmorillonite, la pression de gonflement deviendra nulle. La composition minéralogique de cette zone sera probablement caractérisée par une séquence de calcite, des minéraux C-(A)-S-H, des zéolithes de calcium, de la sépiolite et de la saponite. Les minéraux C-S-H se formeront dans la zone la plus proche du ciment, tandis que les autres minéraux tels que les zéolithes et les argiles seront présents dans une zone plus éloignée. Une zone d’échange d’ions (Ca – Na), de quelques dizaines de cm d’épaisseur, se formera dans la montmorillonite à l’avant de la zone de réactions de dissolution-précipitation minérales. Dans le cas d’un revêtement en béton OPC, on estime que la masse de bentonite altérée augmentera d’un facteur de 2.5, l’épaisseur des zones d’altération étant multipliée par un facteur allant de 2.5 à 3 pour les diamètres de galeries considérés (~ 60 % du volume total de bentonite).

100 000 ans après la fermeture du dépôt, on considère – de façon pessimiste – que le revêtement en béton aura perdu toutes ses capacités physiques en raison de sa dégradation.   Toutefois, il est possible que subsiste une zone comportant de l’ettringite, de la calcite et de la tobermorite.

On estime que, un million d’années après la fermeture du dépôt, la barrière de bentonite sera dans un état similaire à celui qu’elle avait atteint au bout de 100 000 ans, avec toutefois des produits cristallins de dégradation de l’argile et du béton en plus grandes quantités.

On prévoit que les interactions entre un conteneur en cuivre et la bentonite se limiteront à de faibles quantités d’échange de cations dans la montmorillonite (Cu – Na), ce qui n’entrainera pas de modifications des caractéristiques importantes pour la sûreté du dépôt sur l’ensemble de sa durée de vie.